Le Centre d'Art Contemporain Genève a le plaisir de présenter la première exposition individuelle internationale de l’artiste britannique GEORGE SHAW. Cette exposition comprend une nouvelle série de peintures, une sélection de dessins – parmi les très nombreux dessins de l’artiste, qui n’ont encore jamais été présentés au public – ainsi qu’une nouvelle performance.

Les peintures de Shaw révèlent une fascination certaine pour l’anglicité. Autour de l’artiste, les mythologies de la culture populaire anglaise – ses dessins de personnages tristement célèbres tels que Peter Sutcliffe ou encore les vieux magazines de charme éparpillés dans son atelier – semblent former une concrétion qui informe, sans toutefois diriger, son regard de peintre. Pourtant son art décrit aussi, plus largement, une certaine modernité du monde européen.

Les oeuvres de l’artiste se fondent sur des photographies des banlieues prolétaires, souvent prises par l’artiste lui-même et sa famille, ou parues dans des magazines locaux. Ses paysages de banlieue, montrant des mairies, des rangées de garages, des parcs défraîchis ou des terrains de jeux, sont le fruit d’une application méticuleuse d’émail Humbrol sur bois, un travail assidu permettant d’obtenir des images séduisantes, brillantes et très détaillées. D’une nostalgie assumée, l’atmosphère pesante que l’artiste reproduit dans ses toiles est à la fois irrésistible et troublante. Son oeuvre rend parfois hommage au cinéma Kitchen Sink – le réalisme social britannique à la charnière des années 1950 et 1960 – dans une version actualisée et dépolitisée.

La première peinture que Shaw réalisa en 1996 représentait un magasin. Depuis, il en a produit plusieurs dizaines. Celles-ci projettent dans le monde actuel la mémoire collective d’une période spécifique du développement urbain anglais, créant ainsi des images à la fois familières et inquiétantes, sereines et angoissantes. Ainsi, l’objectif des “villes nouvelles” comme Coventry ou Milton Keynes, érigées surtout durant les années 1970, était de donner un nouvel élan au pays, loin des bombardements destructeurs de la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, ces images pouvaient tout autant s’inspirer de paysages résidentiels du centre de la France ou des banlieues de Moscou. Dans ses peintures, Shaw supprime tout indice – voitures ou affiches – sur l’époque ou l’emplacement. Il joue avec le temps, se référant à un passé non précisé et à un présent reconnaissable.

Comme le coloriste victorien Atkinson Grimshaw, GEORGE SHAW s’intéresse surtout à l’expression de la lumière. L’application méticuleuse d’émail Humbrol permet d’obtenir une luminescence extraordinaire, chargée d’émotions contrastées, à la fois élégiaque et inspirant un sentiment d’attente. Ses peintures décrivent l’empreinte du temps et du lieu, lorsque l’inaction est un événement en soi. La banalité devient cérémonie et, dans leur immobilité, ces scènes de banlieue présentent un monde qui pourrait apparaître aux fantômes: la mort rôde dans ces parages prosaïques, signifiée par l’absence.

Commissaire de l’exposition : Katya García-Antón

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